Sur le western

Dans le western, tout, du grincement de la porte du Saloon à l’arrêt du chant des grillons, fait symbole. Chaque phrase, chaque geste, chaque grâce signe notre humanité. Une danse des puissances où la morale n’a pas sa place. Ou le contrat social du vivre ensemble et les discours qui l’accompagnent (le bien, le mal, le camp à choisir) ne résiste jamais au premier acte. Une  école de lucidité. Une remise en cause radicale de la dualité. Retournement d’une incroyable audace : rien de moins clair, en vérité, que ce duel qui ne dissipe aucune des brumes de l’âme. Rien de plus authentique aussi. Lorsque l’homme sort de sa maison, toujours en clair-obscur, sous le soleil des autres, il est seul. Libre. Ou sur le point de perdre cette liberté. Un jeu de la vérité où les positions fluctuent au rythme du vent. Ou le libre-arbitre se confronte sans cesse à la justice des hommes. Un combat cosmique à hauteur de chacun. Une mythologie réduite à l’essentiel. Alliances et trahisons, pouvoir et corruption, amour et vengeance. Tout est là, clair, brut. La naissance, la mort, l’amour, la solitude. Mais surtout, surtout, la vibration d’intensité toujours changeante entre l’envie et le désir. Comme le secret du monde.

De loin, le western passe pour un sous-genre de l’industrie culturelle, juste bon à flatter nos pulsions les plus basses. En son cœur, le bon western est un détonateur interne. Une dose de nitroglycérine qui arrive à nous faire douter de notre propre morale. C’est qu’ici, ce qui importe n’est pas l’histoire d’hommes et de femmes interchangeables dans une Amérique mythifiée. Au fil de la pellicule, suspendu au silence, se joue la survie de ce qui nous anime.

« Il taille un morceau de bois. Et j’ai l’impression que quand il aura terminé, il se passera quelque chose. »
Il était une fois dans l’Ouest, Sergio Leone, 1968

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