Note sur la poésie #91

Comment créer sans détruire ? Comment ajouter sans peser ? Et à quoi bon produire lorsque la technique peut le faire : les robots pour la matière (pièces usinées, travaux agricoles, imprimantes 3D), l’algorithme pour les choses de l’esprit (textes, musiques, dessins) ?
A quoi bon faire ? A quoi bon créer aujourd’hui où il n’est plus question de crise mais de son résultat : le monde qui apparait et submerge nos habitudes, nos anciennes joies, nos repères de ce qu’il faut, ou fallait faire, pour avoir une vie bonne.  Ce n’est pas juste une question intime, une question qui indique le passage du temps, les générations, les confrontations de styles. Quelque chose de profondément nouveau, différent, advient. Et porte le risque de l’étouffement du désir. Tout semble disponible.Pas seulement ce qui est mais ce qui pourrait être.

Alors la poésie, pour ce qu’elle produit, justement, de l’acte d’écriture à la résonance en celui ou celle qui reçoit le poème. L’acte même de poser et d’offrir des mots à la fois inutiles et essentiels pour cerner, d’une même poignée de vers, notre condition intime et commune. Ses accords, ses décalages, ses courants, parfois contraires. Le poème permet cet ajustement dynamique de nos vies, en reprenant la barre, même pour quelques instants-mots, de notre direction. En accueillant aussi les forces extérieures, lâcher-prise conscient pour naviguer au mieux et créer l’étincelle.

Une rétention d’humanité.

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