UPPLR #77 : Je n’aurais pas pu voir, par Thierry Radière

Ce n’est pas faute
de vouloir comprendre
mais à chaque fois
un bout de laine
un grain de sable
une particule de bois
s’immisce quelque part
et c’est foutu
il faut tout reprendre
à zéro
ou s’en contenter
si rien ne disparaît
et alors une fiction se prépare
mais elle est peut-être là
l’origine du malaise :
trouver une suite
jour après jour
à l’invention de son existence
qu’elle paraisse plus vraisemblable.

Thierry Radière

Entre midi et minuit, La Table Ronde, 336 p., 17 €

Écoutez ce poème (lecture Stéphane Bataillon) :

 

Avec son nouveau recueil, Thierry Radière tente d’inscrire les émotions qui remontent lorsque l’on imagine les moments de vie qui pourraient découler de l’observation du réel : un déjeuner espéré, qui se prépare enfin à partir d’un pot-au-feu qui mijote, de petits acouphènes provoqués par les pépiements de moineaux, qui font oublier les tourments intérieurs, une tasse de café livrant la chaleur nécessaire pour continuer d’inventer des personnages de fiction qui augmenteront les jours. Professeur d’anglais, nouvelliste, romancier et poète, Thierry Radière ne se contente pas d’une contemplation du monde. En dédiant beaucoup de ces poèmes à ses confrères en écriture, des grands anciens comme Federico García Lorca aux voix contemporaines telles que Perrine Le Querrec ou Charles Pennequin, il transforme l’acte d’écriture en main tendue et fraternelle. Un très bel ensemble qui, loin des postures et en résonance fréquente avec l’enfance, tente de transmettre ce qui fait le sel d’une existence parmi les autres.

Stéphane Bataillon (@sbataillon)

Retrouvez ce poème dans La Croix l’Hebdo du 9 avril 2021

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